Par Michael Mbuembue
Jenny Malala a beaucoup travaillé dans la vente, la restauration et l’hôtellerie entre Paris et Antananarivo. Son aventure entrepreneuriale démarre après un burnout en 2016 qui lui a ouvert les yeux sur la nécessité de créer sa propre structure où elle fixerait ses propres règles et où« je pourrais enfin impacter comme je l’avais toujours souhaité » exerçant auparavant en tant que consultante dans un cabinet spécialisé dans l’accompagnement d’hôtels, Jenny Malala a connu un parcourt des plus atypique ; Ayant commencé par le freelancing, poursuivit par un projet d’application mobile de livraison de repas alternatifs, elle est repérée par un cabinet spécialisé en hôtellerie. Elle y a exercé en tant que consultante une année en même temps qu’elle se formait en coaching.
En Janvier 2018, Jenny Malala lance TUMBU : une agence d’empowerment dont le but est d’aider les professionnels de l’hôtellerie et des services à ressortir le meilleur de Madagascar à travers des accompagnements adaptés au contexte local.
Les résultats atteints par votre entreprise TUMBU sont-ils satisfaisants ?
Si on tient compte du fait que j’ai démarré TUMBU seule, avec l’équivalent de 50 USD dans mes poches, à louer des salles de conférence et, qu’aujourd’hui nous sommes une véritable équipe installée dans un des quartiers d’affaires les plus prisés de la capitale avec notre propre infrastructure, comment ne pas être fière de ce chemin parcouru ? Je ne me voyais pas réaliser ce que je fais aujourd’hui avant mes 40 ans alors que je n’en ai que 31 pour le moment. D’autre part, nos clients apprécient notre concept, les feedbacks sont presque toujours positifs et le fait que les clients fidèles soient de plus en plus nombreux confirme que nous répondons à un besoin bien réel. À ce jour, nous avons formé plus de 2000 personnes et, mon équipe et moi sommes très reconnaissants pour cela. Toutefois, il reste beaucoup de marge de progrès sur d’autres segments de marchés, d’autant plus que nous nous intéressons aux autres pays d’Afrique francophone.
En quoi consiste précisément l’accompagnement des hôtels par votre entreprise ?
TUMBU leur dispense, tout comme aux restaurants et aux commerces, des programmes sur-mesure, personnalisés en fonction de leurs besoins, du niveau de leurs collaborateurs (réceptionnistes, serveurs, femmes de chambre etc…), des contraintes de l’établissement, de leurs procédures (existantes ou celles qu’ils souhaitent les mettre en place) ainsi que de leurs objectifs. Nous nous déplaçons volontiers sur le terrain, et ce sur toute l’île. Notre équipe a l’habitude, par exemple, d’être face à des employés qui ne comprennent pas forcément tous les enjeux de la satisfaction des clients car eux-mêmes n’ont jamais expérimenté le séjour dans un hôtel, ce qui est normal. Du coup, nous faisons en sorte que pour ces personnes, le message soit compris et établissons des recommandations pour que ce message reste.
Quels types de programmes et modules sont développés au sein de votre entreprise pour la formation des professionnels et non professionnels?
Nous avons des modules qui s’adressent aux professionnels et futurs professionnels de la restauration et de l’hôtellerie, tels que celui sur le foodcost management ou la gestion du service traiteur, en événementiel avec notre programme phare sur les bases de l’évent planning. Nous nous adressons également aux porteurs de projets à travers nos formations sur l’ouverture d’un restaurant, ou de guest house. Enfin, nous essayons d’adapter nos offres aux besoins que nous détectons, comme c’est le cas pour notre module sur la vente en ligne que, nous avions développé pour répondre à l’augmentation des e-commerçants et de leurs aspirants depuis le début de la pandémie.
Quels sont les différents débouchés pour ceux en fin de formation ?
Nombreux de nos apprenants qui n’ont pas été envoyés par leur employeur trouvent dans nos modules les réponses pour se lancer dans l’entrepreneuriat ou, pour améliorer leur activité. Dans tous les cas, nous mettons tout en œuvre pour susciter l’envie aux personnes qui participent à nos formations de pratiquer après les sessions (outils supplémentaires, assistance après formation).
Comment affrontez-vous la concurrence et quelles sont vos difficultés ?
Même si ce n’est pas facile tous les jours, nous regorgeons de nouvelles idées donc, nous exploitons cela pour continuer à nous démarquer et offrir la meilleure expérience d’apprentissage possible. Nous nous efforçons aussi de mettre en pratique ce que nous enseignons car pour moi, il est hors de question qu’il y ait une incohérence à ce niveau, question de crédibilité.
Étant donné qu’à Madagascar, certains opérateurs ont tendance à se contenter à mettre le paquet sur les infrastructures, la valeur du capital humain n’est pas toujours reconnue. Par conséquent, il nous est parfois compliqué de les convaincre d’investir dans ce sens.
La pandémie a changé la manière de travailler ainsi que le pouvoir d’achat de nos clients, elle nous a forcé à chercher une solution d’appoint pour dispenser nos formations à distance. Depuis, nous avons régulièrement des demandes d’inscription venant de personnes vivant en RDC, au Cameroun, au Sénégal et même en Europe (au sein de la diaspora africaine). Notre challenge aujourd’hui est de comprendre le contexte professionnel de chacun de ces pays pour pouvoir élaborer des contenus spécifiques.
Votre vision par rapport à votre entreprise ?
Nous sommes en train de préparer notre propre plateforme d’e-learning, qui est une suite logique de nos activités.
Nous ambitionnons de devenir une référence en Ed Tech, en tant que pourvoyeuse de formations adaptées aux contextes et aux cultures des pays émergents de l’Afrique francophone.Nous voulons permettre aux professionnels du service à la clientèle et de l’hôtellerie, de se façonner une véritable carrière et d’avoir accès à des contenus applicables dans leur environnement ainsi qu’a des outils modernes tels que l’utilisation de l’e-learning.
Le secteur de l’hôtellerie en plein expansion à Madagascar participe-t-il réellement à son économie touristique ?
Avant la pandémie, j’aurais dit : OUI pour l’hôtellerie et la restauration ! D’autant plus que le tourisme domestique se réveille de plus en plus à Madagascar. Aujourd’hui, plus que jamais, la survie des opérateurs dépend de leur capacité à s’adapter. Cependant, pour que le développement soit palpable y compris sur l’aspect social, il faudrait que le secteur de l’hôtellerie puisse mieux valoriser ses employés. En effet, ce ne sont pas toujours des métiers qui font rêver et les conditions de travail sont parfois à peine décentes, surtout que la pandémie a encore plus fragilisé ces emplois. Heureusement, les mentalités sont en train de changer petit à petit..
Vous avez été sélectionnée en 2018 par la Fondation Tony Elumelu pour le financement de votre projet, cela vous a-t-il permis de décoller véritablement ?
Le programme de la Fondation Tony Elumelu est un excellent catalyseur qui m’a permis d’accéder à un incroyable réseau d’entrepreneurs solidaires. Grâce au business plan que la fondation a validé et au financement, nous sommes assurément sur de bonnes bases pour amorcer notre phase de croissance.
Le Sommet Women In Africa en 2019, une gratification pour Tumbu ?
Absolument, mais pas que ! La participation au Sommet Women in Africa et surtout, l’honneur d’être lauréate de Madagascar, m’ont fait réaliser que TUMBU a vraiment quelque chose à apporter. C’était aussi une formidable occasion de me mettre en contact avec d’autres guerrières de l’entrepreneuriat et d’apprendre d’elles. Par ailleurs, l’Afrique comporte plus de femmes entrepreneures que les autres continents, c’est incroyable de faire partie de ce tourbillon qui, je l’espère, secouera le continent et le monde.
En dehors de votre entreprise quel type de personne êtes-vous dans votre vie personnelle, passions, loisirs, occupation, vie familiale ?
Je suis la maman d’un merveilleux garçon de 8 mois, j’ai aménagé mon travail pour passer le maximum de temps avec lui mais, ce n’est pas toujours évident. Malgré cela, j’ai deux autres activités : Yumicious ; un petit atelier où nous produisons des mélanges pour brownie en mettant en avant les matières premières locales, ainsi qu’une boutique en ligne d’articles de décoration pour événements et de tatouages éphémères. Il fut un temps où je tenais un blog car, écrire est l’un de mes moyens d’expression préférés mais depuis, je me cantonne au microblogging sur Twitter.
Sinon je suis très séries, dès que j’accroche, il faut que je finisse. Du coup, j’évite un peu lorsque j’ai beaucoup de charge de travail. En ce moment je regarde Suits, UmbrellaAcademy et, même si aucune suite n’a été annoncée, je continue à espérer une suite de The OA. Enfin, je suis une grande gourmande ; Avec mon homme, nous aimons expérimenter en cuisine, goûter à de nouveautés, découvrir les cultures culinaires et les techniques d’ailleurs. Ensemble, nous chérissons le rêve d’ouvrir un Food lab juste pour le fun.
Bravo Jenny
jenny recevra votre appréciation merci également à vous d’etre parmi nos lecteurs